A Saint-Malo, des habitants se rebellent: "intra-muros va devenir un Mont-Saint-Michel"
Des malouins d'Intra-muros se rebiffent. Ils se sentent poussés à partir de la cité corsaire. Ils protestent contre le tourisme sauvage et la spéculation immobilière.
Roger est né, il y a plus de 80 ans, intra-muros et il y vit toujours. Il connaît son Rocher par coeur. Pour lui, le nombre de malouins diminue à l'intérieur des remparts d'une année sur l'autre: "Il en reste entre 1200 et 1500. Jusqu'en 1970, il y avait 6 à 7000 habitants. Intra-muros deviendra bientôt un monument sans vie, très certainement à l'image du Mont-Saint-Michel.". Ce sont les administrations trop à l'étroit qui sont parties les unes après les autres. Les commerces de proximité ont suivi, témoigne Véronique Deschamps.
J'ai connu une époque où il y avait une dizaine de boucheries, intra-muros. Aujourd'hui, il en reste une
Cette coiffeuse habite intra-muros depuis 40 ans. "Moi j'ai commencé en 1979. Il y avait alors onze salons de coiffure dans les murs. Tout le monde travaillait avec les administrations, avec les commerçants, les gens qui vivaient là. Maintenant, nous n'avons plus que trois ou quatre salons. Là, on vient de perdre notre pharmacie. Ce sont les galettes Saint-Michel à la place. On ne va pas dire que c'est pour les malouins." Roger renchérit: "J'ai connu une époque où il y avait une dizaine de boucheries. Aujourd'hui, il en reste une.".
Les deux malouins expliquent que, depuis quelques années, les appartements dans la cité corsaire sont achetés, au prix fort, par des investisseurs qui les louent aux touristes. "On nous pousse à partir.", se désole Véronique qui possède un étage dans une maison historique, près de la cathédrale. Tout allait bien avec les voisins, jusqu'à ce qu'un nouveau propriétaire mette son bien en location sur une plateforme en ligne. "On s'est retrouvé avec 96 locataires en 16 mois. Les allées et venues à n'importe quelle heure. Ils font du bruit. Ils envahissent tout l'espace. Çà leur est égal, ils sont à l'hôtel. Mais nous, on ne nous a pas demandé si nous voulions vivre dans un hôtel.".
Le slogan d'Airbnb c'est: soyez partout chez vous. Moi, en revanche, je ne me sens plus chez moi
La coiffeuse fait remarquer que ces investisseurs vivent tranquillement ailleurs et ne subissent pas les nuisances, eux. "Le slogan d' Airbnb c'est: soyez partout chez vous. Moi, en revanche, je ne me sens plus chez moi.". Ne croyez pas que les deux malouins soient des anti-touristes. "On a toujours vécu avec les touristes dans les murs.", fait remarquer Véronique. Roger est même un "greeter". Par passion pour son Rocher, il est devenu guide bénévole pour ses hôtes du monde entier.
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